vendredi 28 mars 2014

Critique de la pièce "L'aide-Mémoire"

Genre: à oublier (note: 0/****)

Elle débarque un beau matin comme ça chez lui en prétendant chercher un Monsieur Ferrand. Elle s'est trompée d'étage. Il l'éconduit mollement. Elle ne veut pas se laisser éconduire, elle s'asseoit, prend ses aises puis ses marques. Elle finit par s'installer et avec elle s'installe un joyeux bordel dans la vie de ce célibataire maniaque de l'ordre aux 134 conquêtes d'un soir, toutes répertoriées dans un catalogue, sorte d'aide-mémoire. Est-elle dans cet aide-mémoire ?

Dès l'ouverture du rideau, une chose frappe : la scène est encombrée par le décor. Trop de choses se disputent l'espace alors qu'il est clair qu'un homme au placard si bien rangé, si minimaliste, ne saurait vivre dans cette pièce étouffée de meubles et objets étalés sur trois niveaux. Se rajoute à ça que les acteurs ont à peine la place de circuler. Un canapé ou un lit posé devant un portant de costumes tous identiques aurait suffit.

Au fur et à mesure que la pièce se déroule, on se demande rapidement s'ils ont suffisamment répété : ils buttent (tous les deux) sur les mots, cherchent leurs phrases, leur place, semblent mal à l'aise avec leurs gestes, la mise en scène, les accessoires (le porte-manteau se renverse sur Pascal Greggory, clairement pas prévu). On pouvait espérer largement mieux de Ladislas Chollat, qui avait su chorégraphier si superbement "On ne badine pas avec l'amour" de Musset (Théâtre du Ranelagh - 2003) en s'affranchissant d'une mise en scène classique pour y mettre un grain de folie.

Mais tout ceci n'est pas grand-chose par rapport au vrai problème de la pièce : le casting. Sandrine Bonnaire est trop intello pour le rôle, pas assez légère, pas assez décalée, n'a pas le côté désinvolte du personnage et n'est pas crédible pour deux sous. Dans ce rôle il y avait eu jadis Jane Birkin (bon choix), il aurait fallu pour cette réédition une Vanessa Paradis. Face à elle Pascal Greggory a l'air de sortir du coma. Il est mou, trop effacé, trop tendre, trop efféminé pour un macho censé afficher 134 femmes d'un soir au compteur et zéro intention d'en laisser une seule poser ses bagages dans sa tanière, encore moins dans sa vie. L'alchimie entre eux est, de plus, inexistante. On pouvait s'attendre à mieux de deux acteurs aussi expérimentés. J'ai été d'autant plus déçue par Pascal Greggory qu'il avait participé de mon plus beau souvenir de théâtre : "Phèdre" mise en scène par Patrice Chéreau à l'Odéon aux Ateliers Berthier en 2002.

La pièce dure 2h. Je n'avais qu'une hâte : en finir, rentrer chez moi et oublier cette énorme déception.

Auteur: Jean-Claude Carrière
Mise en scène: Ladislas Chollat
Avec Sandrine Bonnaire et Pascal Greggory
Théâtre de l'Atelier - place Charles Dullin - Paris 18e
(jusqu'au 5 juillet 2014)

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